Un chef d'œuvre du film noir sorti pour la première fois dans les salles obscures en mars 1971 à New York. Ce film de Mike Hodges racontant la vengeance d'un gangster de Londres est si frappant et saisissant que malgré son age (41 ans a l'heure ou j'écrie ces lignes) il a su traverser les ages pour se faire une place parmi les plus grandes productions du genres naturalistes. Relativement peu encencé par la presse a l'époque, il fait parti de ces rares films qui se bonifient avec le temps et qui continuent a servir de sources d'inspiration infinie pour les nouvelles générations et celles qui suivront...
A première vu Le scénario en lui-même n'a rien d'extraordinaire, comme dit plus haut, Jack Carter, le personnage principal campé par un excellent Michael Caine, emprunte le chemin de la vengeance pour laver un affront fait à sa famille. La mort de son frère Franck le pousse a quitter l'Est End Londonien pour retourner a Newcastle sa ville natale et mener sa propre enquêtes, le rapport de police ne suffisant pas à satisfaire ses interrogations.
Commence alors une longue descente aux enfers dans la crasse et l'insalubrité du nord de L'Angleterre ou Jack sera confronté a la pègre locale et ou aucun faux pas ne lui sera permis pour venger son frère. Une histoire de gangsters qui parait classique en première lecture mais qui nous livre son lot de coups de théâtre et de révélations inattendues au gré des avances dans l'enquête pour en faire une histoire plus qu'agréable et intéressante a suivre. Dans l'ensemble, bien que datant des années 70 le film n'a pas du tout mal vieilli et reste très agréable à regarder, le fait qu'il soit relativement vieux lui donne un petit cachet old school qui n'est pas pour me déplaire, de plus nous avons droit à une très belle mise en scène avec un jeu d'acteurs extrêmement satisfaisant. J'ai aussi trouvé que les doublages français tenaient bien la route.
Pour parler du contenu intrinsèque du film, je dois avouer que j'ai été sédui dès les premières minutes. Quelque chose se dégage à partir des premières scènes et je me suis très vite senti happé par l'atmosphère qui en émane durant tout le long. L'intrigue qui se déroule sous l'ère sidérurgique à Newcastle donne un univers très anxiogène, très piteux où l'on sent bien la dureté de la vie prolétarienne anglaise avec les hautes cheminées des usines qui crachent leurs brumes. On pourrait citer en exemple cette scène ou Le cortège funéraire vient chercher le corps du défunt chez lui dans la cité ouvrière, on retrouve ces ruelles typiques des villes industrielles anglaises très étroites et jalonnés par de petits logis en briques rouge, faisants face aux énormes usines laissant entrevoir leurs façades à travers l'épaisse fumé grise de leurs haut fourneaux.
Un spectacle macabre qui fait office de décore journalier pour la population locale... contexte propice à la prolifération de la pègre... Un univers captivant donc de pare sa particularité qui plonge le spectateur en plein cœur de la violente réalité sociale de l'époque, violence sociale qui n'a pas totalement disparue de nos jours d'ailleurs !!
Les scènes très crues du film et les teintes d'humour noir qu'on retrouve dans plusieurs passages viennent encore accentuer ce sentiment d'anxiété qui nous submerge. Certains passages sont très hard et bien qu'aujourd'hui nous sommes habitués à un certains type de violence car évoluant dans une société moins complexée qu'auparavant je doute que des films aussi crues et explicites sur ce thème puissent voir le jour (ou du moins sans subir la censure). Le fait est que là ou dans les productions actuelles la brutalité et l'agressivité sont en quelques sorte stylisés et esthétisés pour susciter chez le spectateur de la fascination et de l'approbation, Hodges par l'intermédiaire des ses acteurs nous dépeint ici un réalisme dure et féroce dans la plus pure tradition « Hard Boilled ». Une approche en totale opposition avec le spectaculaire, le but étant de faire prendre conscience des externalités néfastes causés par l'agressivité des affrontements entre gangsters. Ici, pas de « scènes d'action hollywoodiennes » ou de « Gunfights » a n'en plus finir, la violence est distillé tout le long du film et représentée de manière beaucoup plus subtile par des dialogues incisifs entre les différents protagonistes, par les décors lugubres et l'agressivité architecturale de la ville mais aussi bien sur par quelques scènes très peu nombreuses mais efficaces pour décrire les conséquences des guerres entre voyous sur la population. Citons par exemple le moment ou Carter balance du haut d'un immeuble en construction un homme dans le vide avant qu'il ne s'écrase sur le toit d'une voiture tuant par la même occasion ses passagers totalement étrangés à l'affaire! Cet aspect fait d'ailleurs partie des points essentiels que Hodges et Caine lui-même voulaient démontrer aux spectateurs. Même chose pour le traitement de la sexualité qui dans ce monde ne se propage ni par amour ou tendresse mais par des vecteurs tels que la pornographie ou l'amour tarifé...
Nous sommes aussi gratifiés de quelques passages mythiques avec des répliques cultes : "Tu sais, j'avais presque oublier de quoi elles ont l'air tes mirettes..... Elles n'ont pas changés, ......deux trous de pisse dans la neige."... Le ton est lancé!
J'en viens à l'élément le plus remarquable du film, le clou du spectacle j'ai nommé Michael Caine. Son interprétation de Jack Carter est juste phénoménale, on est littéralement séduit par sa prestance et son charisme, et il faut avouer que même physiquement il en impose : Grand blond bien bâti avec une belle gueule, les épaules carrés dans son complet bleu nuit. Sa violence et son franc-parler entrecoupé d'un humour cynique fait de lui un personnage atypique, un anti-héros dont on ne se lasse pas de voir imposer sa loi autour de lui. En effet Jack Carter est une belle enflure et c'est le cas de le dire. Je ne m'attendais pas du tout à cela, car durant les premières minutes du film nous sommes en présence d'un personnage a l'allure respectable et courtoise : le parfait british Gentleman. De plus ce qui le motive avant tout c'est la vengeance de son frère donc un idéal noble qui implique à celui qui le suit d'avoir un esprit chevaleresque et de faire preuve d'honneur et de droiture. Pourtant il n'en est rien, au fur et à mesure que le film avance dans sa narration on se rend compte que Carter est un salop qui n'a aucune considération pour les autres et qui les utilise à sa merci, ce qui donne plus de volume au personnage et donc plus de réalisme. Il aime prendre les autres de haut et garde a chaque fois une attitude hautaine envers ses interlocuteurs... Un narcissisme profond se dégage de lui quelques fois sans même qu'il n'ait besoin de parler. Pour preuve le passage en début de film ou il se rend dans un bar : Dès son entrée, les locaux le dévisagent en lui jetant des regards ingrats du coin de l'œil car ils ressentent le mépri et le dégoût qui émane de cet individu venant de la Capitale et ne font que les lui renvoyer... Il sème le chaos et la mort autour de lui, (pas toujours de manière volontaire), se montre cassant et ingrat même avec les personnes sensées être de son coté. Les femmes ne sont rien d'autres que des objets pour lui et les hommes des serpillières ou des marches sur lesquelles il s'essuie ou s'appuie selon les besoins. Une représentation très appuyée de cette « Virilité » propre a cet environnement et qui tend à disparaître dans le Cinéma. Seule la petite Doreen (sa nièce) saura l'attendrir et toucher son cœur!
Un personnage fascinant donc qui n'aurait pue être autant sublimé au grand écran sans le talent et la classe de Michael Caine. La fameuse scène sur la plage est juste incroyable, l'une des meilleures du film si ce n'est LA meilleure, je ne peux m'empêcher de vous en conter une partie : Lorsque Carter vient de mettre fin a la vie de son Ennemie Eric Pierce après une course folle dans la carrières de charbon ou il lance le mythique « Good Bye Eric » d'une voix stridente avant de lui fracasser le crâne avec la crosse de son fusil... Carter descend la pente escarpée avec un sentiment de victoire infinie sur son visage et ricanant comme un diable le fusil tenu fièrement a l'épaule ! Il regarde Eric emporté par la benne qui le jette à la mer en même temps que les minerais sans valeurs... tout cela au son d'une sublime et marquante mélodie au piano... un scène d'une grande classe!
Caine aura encore une fois a marqué de son emprunte le cinéma britannique et même mondiale puisqu'en 2000 un remake du film a été réalisé par les studios hollywoodiens avec Sylvester Stallone dans le rôle de Carter. Caine n'étant qu'a l'aube de sa carrière suivront encore d'excellents films comme Le Limier, La Vallée Perdue ou plus récemment la trilogie Batman de Christopher Nolan.
Enfin bref vous l'aurez compris j'ai été totalement conquis par ce film et par la prestation de l'acteur principal, film que je vous conseille grandement, croyez moi ça vaux le détour !
A plus!
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